Remords pour un tapis
Aux portes de l’Inde, l’armée d’Alexandre le Grand, épuisée, se révolte contre son chef qui veut l’entraîner malgré elle au bout de la Terre. Tandis qu’Alexandre affronte la rébellion, Roxane, « la Resplendissante », brûle pour le général qui a pris la tête des révoltés.
Qui franchira le pas sans retour ?
Je suis revenu à Kerman hier pour acheter ce tapis que je regrettais trop d’avoir laissé chez le marchand. J’ai pris un bus : il n’y en avait qu’un, au plus fort de la journée et j’ai donc passé 5 heures entre 1 heure de l’après-midi et 6 heures du soir dans une fournaise sur la route du désert. Je retrouvai Hussein, nous allâmes changer de l’argent puis acheter le tapis en question. Il me parut moins beau que dans mes rêves : un peu plus terne sans doute.
Hussein m’invita à dîner chez lui. Alors que nous arrivions devant sa maison, sa femme et sa fille rentraient également. Roshanak fut tout éberluée de me voir et très contente. Nous dinâmes puis allâmes nous promener ; enfin Hussein me proposa de passer la nuit ici ; je protestai puis finis par accepter. On me prépara un couchage sur la terrasse et je passai ainsi la nuit sous les étoiles. Je fus bien content de la couverture que l’on m’avait proposée car la nuit se révéla bien fraîche.
Hier et ce matin chez Hussein, Roshanak avait quitté son habit noir de sortie : elle portait un jean, un chemisier multicolore à manches courtes mais elle garda la tête couverte avec un foulard de couleur vive. La mère et la grand-mère quant à elles gardaient un long voile autour de leurs vêtements.
J’ai obtenu sans souci mon billet pour Téhéran grâce à Babak, le fils du directeur de l’agence Iran Air à Kerman, puis j’ai faussé compagnie à Hussein pour quelques heures (douche, passage chez le barbier, promenade dans le bazar) avant de le retrouver au Tchaï-khuné où nous avons déjeuné avec Roshanak et son frère. À quelques pas du bazar, Hussein me fait visiter un bain vieux de 300 ans et encore en activité. Aux murs, des céramiques regorgent de fleurs et d’oiseaux. Dans l’après-midi nous sommes allés à Joffa, un village à une trentaine de kilomètres de Kerman puis à Mahan avant de revenir à Kerman pour prendre l’avion. Cette fois je n’avais pas loué de compartiment entier ( !) et la famille de Hussein resta les pieds sur terre.
À Joffa, Hussein dit que la ville était célèbre avant la révolution pour la qualité de la vodka que l’on y produisait. Je ne doute pas qu’elle continue à être produite sous le manteau. Mon guide me dit d’ailleurs qu’il fait son propre vin : c’est interdit bien sûr, mais qui ne contourne pas la loi ? Je n’ai pu goûter à sa production : je l’aurais fait davantage pour le plaisir de l’interdit que pour la qualité de sa piquette.
Hussein me montra les ghanats, ces canaux creusés depuis des centaines sinon des milliers d’années pour conduire l’eau des montagnes à l’oasis. Même au plus fort de l’été, ces canaux laissent filer une eau fraîche et limpide. Près de l’un d’eux, au pied de la montagne rouge et brûlée par le soleil, des arbres et de la verdure jaillissaient des rives. Nous goûtâmes tous cette eau délicieuse.
Dans la soirée je prends l’avion pour la capitale où je retrouve les autres à l’hôtel après qu’ils aient passé une soirée avec les étudiants iraniens rencontrés à l’aéroport d’Ispahan et sur qui ils sont tombés par hasard à leur arrivée à Téhéran. Après un dîner dans la montagne, ils se sont promenés dans un parc et ils y ont rencontré des jeunes filles qui les ont éblouis par leur beauté et dont ils me parlent avec ébahissement ; ils n’en sont toujours pas revenus !…
Thierry nous quitte cette nuit et repart vers la France.
(lundi 17 août)
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